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Ségrie (72)

A la limite du Massif armoricain et du Bassin parisien,

le Sentier géologique de Ségrie (Sarthe)

Ce sentier à été mis en place à l’initiative de la municipalité en partenariat avec la Cemex, exploitant actuel de la carrière du Châtelet à Ségrie.

Cette remarquable réalisation a été inaugurée le 21 Juin 2014 lors d’une sortie animée par l’APGN (Association Patrimoine Géologique de Normandie) qui a réuni un public intéressé et fortement motivé (http://www.apgn.fr/photos.php).

Le sentier, qui s’inscrit sur les formations paléozoïques de l’extrémité orientale du Massif armoricain et sur les formations mésozoïques de l’ouest du bassin parisien (fig.1) invite les promeneurs à découvrir la commune à travers sa géologie : savoir lire les roches, connaître les matériaux, leur méthode d’extraction et leur utilisation pour mieux comprendre les spécificités du bâti local.

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Fig.1 - Carte géologique simplifiée de la région nord de Ségrie, Sarthe (en rouge, tracé du sentier géologique).

Renseignements utiles

Feuilles topographiques Ign 1/25 000ème : 1618 OT et 1718 Ouest

Feuilles géologiques 1/50 000ème : Sillé-le-Guillaume (321) et Beaumont-sur-Sarthe (322)

Longueur : 11 km, balisage orange (souvent inexistant et assez difficile à suivre) – Durée : environ 3 heures.

Descriptif du parcours (fig.2)

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Point de départ à l’ancienne gare de Ségrie (rue de la Gare) sur la D 21 menant à Saint-Christophe-du-Jambet. Le site est équipé de panneaux informatifs et descriptifs du sentier.

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Partir à l’ouest par le chemin longeant la voie ferrée jusqu’au cimetière.

Aller à droite puis aussitôt à droite par la petite route qui monte vers la croix de Clermont.

Le parcours se fait dans un paysage largement ouvert sur un sous-sol de calcaires jurassiques avant d’aborder la montée sur le plateau constitué de formations crétacées (Cénomanien). Il permet, à la Fuie et au Bois-Meslier, d’observer l’architecture traditionnelle du Pays belmontais (de Beaumont-sur-Sarthe) mariant grès ferrugineux (le roussard) et calcaires.

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Arrêt n°1- La croix de Clermont

Aujourd’hui plantée à gauche de la route (avant elle se trouvait à droite) sur le passage du GR 36 cette croix monolithique asymétrique, réalisée en grès roussard dont on trouvera l’explication de l’origine à l’arrêt suivant, est typique des nombreuses croix qui balisaient et balisent encore les voies de communication du pays.

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Il s’agit de l’une des plus imposantes par ses dimensions puisqu’au 1,47 m qui dépasse du sol il faut ajouter 1,20 m non visible.

En ce lieu, elle se trouve accompagnée de blocs décoratifs de grès roussard travaillés par l’érosion.

Continuer la route pour rapidement atteindre un bois qui se trouve creusé de nombreuses excavations qui ont fourni du grès roussard pour la construction et dont on voit encore quelques petits fronts de taille et des blocs tout-venant.

Arrêt n°2

Panneau 1 – Le grès roussard

Le grès roussard est une pierre de taille de couleur rouille, bien connue dans la Pays belmontais. On le retrouve dans de très nombreuses constructions locales du nord-ouest de la Sarthe comme les églises de Ségrie, de Saint-Christophe-du-Jambet, de Fresnay-sur-Sarthe mais plus lointaines comme la cathédrale du Mans.

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Il y a environ 100 millions d’années, au Cénomanien (Crétacé), la mer recouvre l’ensemble du Bassin parisien. Les produits d’érosion des anciennes montagnes du Massif armoricain, la chaine varisque notamment, sont transportés par les rivières, se sédimentent dans la mer, formant les Sables du Maine. Ces dépôts sableux (30m d’épaisseur) présentent des litages obliques qui indiquent la direction des courants marins qui les ont transportés. Après le retrait de la mer à la fin du Crétacé, sous un climat tropical, ces sables vont être partiellement cimentés pour former des bancs de grès discontinus en fonction du battement de la nappe phréatique. Du minerai de fer est souvent associé à ce grès.

Le grès roussard est un matériau très utilisé dans le pays, en particulier comme pierre de taille, sous forme de moellons liés par un mortier. Les déchets de taille ont également été utilisés comme tout-venant.

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L’église Notre-Dame de Ségrie et les nombreuses croix situées au bord des chemins en sont des exemples locaux que l’on verra au long du sentier.

Des traces d’exploitations anciennes de cette roche sont encore visibles sur les hauteurs de la commune de Ségrie, près des Bercons. A l’exception de la carrière de La Bazoge, au sud-est de Ségrie près du Mans, les dernières carrières de grès roussard ont été abandonnées vers 1950.

Les blocs de grès étaient débités et traités sur place à l’aide de masses et de pioches.

Arrêt n°3- Croix cote 162

Croix en grès roussard au lieu-dit Le Bois de la Fosse.

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Partir à gauche sur la route et après quelques centaines de mètres trouver sur la droite le GR 36 que l’on emprunte en lisière de champ. Il débouche sur une route que l’on prend à droite, dépasser une demeure au toponyme géologique (?) (la Maison d’Ardoise) et poursuivre jusqu’à la croix des Bercons.

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Arrêt n°4- La Croix des Bercons (à 100 m au Nord du sentier)

Croix de bornage en grès roussard (récemment déplacée)

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Revenir sur ses pas pour retrouver le GR 36 que l’on prend à droite. Continuer quelques mètres sur le GR 36.

Arrêt n°5-

Panneau 2- Le minerai de fer

Depuis l’Âge du fer et jusqu’au XIXe siècle, l’extraction et la métallurgie du fer ont été actives dans la Sarthe. Le minerai était utilisé dans les forges dont les traces se retrouvent dans la toponymie : « fourneau », « forges », « ferrières ».

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Aux Bercons, le fer se présente sous forme de géodes ou de plaquettes de goethite de 10 à 20 cm d’épaisseur, dispersées dans 10 à 15 m d’argiles et de sables ocres, à environ 20 m de profondeur sous les niveaux renfermant le grès roussard.

Il y a environ 110 millions d’années, à l’Albien et au début du Cénomanien (Crétacé), la région jusqu’ici émergée est envahie par la mer.

Les premiers dépôts marins sont composés d’argiles riches en glauconie et de sables (Argile glauconieuse à minerai de fer) provenant de l’érosion des terres du Massif armoricain.

Vers 65 millions d’années, à la fin du Crétacé, ces dépôts marins riches en fer émergent à la faveur de mouvements tectoniques.

Sous un climat tropical chaud et humide, ils s’altèrent et s’oxydent, conduisant à la formation de goethite (oxyde de fer).

Dans la région, l’exploitation artisanale de petits gisements semble remonter à l’époque gallo-romaine (1er au IVe s. ap. J.-C.) et se poursuit jusqu’au XIXe siècle.

La technique d’extraction souterraine consiste à creuser un puits circulaire d’un mètre de diamètre, desservant 5 à 6 galeries de 15 m de long, à 20-25 m de profondeur. A la fin de l’exploitation le puits est remblayé, laissant la nature reprendre ses droits.

Aux Bercons, le minerai renferme entre 33 et 35% de fer et fournissait les hauts fourneaux de Cordé (Mont-Saint-Jean) et d’Aune (Montreuil-le-Chétif) au nord-est de la forêt de Sillé-le-Guillaume, le manque de compétitivité par rapport aux prix des fontes étrangères mit fin à cette activité dans la région.

Revenir vers la croix et aller à droite par le chemin qui descend vers la D 120 et qui offre de belles échappées vert le nord-ouest.

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Après quelques centaines de mètres apparaissent sur la gauche d’anciens fronts de taille envahis par la végétation et d’autres objets encombrants.

Il s’agit d’anciennes exploitations de sable de couleur ocre (les Sables du Maine) qui renferment d’ailleurs quelques niveaux de roussard.

Arrêt n°6-

Panneau 3- Le Sable

Le sable, au sens commun du terme, est un sédiment meuble et le plus souvent détritique (provenant de la désintégration de roches), formé en grande partie de grains de quartz. A Ségrie, le sable (jaune à ocre) est le plus souvent grossier (taille des grains de 1 à 2 mm) et contient fréquemment des graviers et quelques galets.

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Il y a environ 100 millions d’années, au Cénomanien (Crétacé), le niveau de la mer s’élève et le secteur de Ségrie se retrouve immergé. Il se situe alors dans un environnement deltaïque, au niveau de l’embouchure des fleuves qui drainent le continent armoricain voisin. Les dépôts sont essentiellement sableux (Sables du Maine). Ces sables présentent des litages obliques indiquant la direction des courants marins. C’est dans ces dépôts d’environ 30m d’épaisseur que s’est développé le grès roussard vu précédemment.

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Le sable est un matériau exploité depuis longtemps dans la Sarthe. Les fronts de taille visibles à Ségrie sont des témoins de l’exploitation ancienne de petites sablières artisanales répondant aux besoins locaux, laissées à l’abandon après leur fermeture. De nos jours, la production annuelle des sablières dépasse souvent les centaines de milliers de tonnes et les sites sont réaménagés à la fin de l’exploitation. Elles sont exploitées à ciel ouvert. Suite au décapage du sol, le sable est extrait soit à la pelle et la pioche pour les sablières artisanales, soit à l’aide d’engins (chargeuses) pour les sablières industrielles.

Le sable étant un matériau très recherché pour la construction, dans cette ancienne carrière située près de la Basse-Lande, il a certainement été utilisé de manière locale comme agrégat pour la fabrication de mortier, de béton ou d’enduit comme sur l’église Notre-Dame de Ségrie.

Atteindre la D 120 et la vallée du Souci.

A ce point, le sentier atteint les formations paléozoïques cambriennes et ordoviciennes du synclinal des Coëvrons.

Aller à gauche vers Ségrie. Dépasser la Piedboulerie pour atteindre un chemin qui part à droite, franchit le Souci et rejoint une excavation remplie d’eau.

Arrêt n°7-

Panneau 4- L’ardoise

En ce lieu étaient exploités pour ardoises les sédiments fins de la formation ordovicienne du Pissot.

Il y a environ 470 millions d’années, à l’Ordovicien, la mer recouvre la région. Cette époque correspond au maximum de transgression de la mer ordovicienne.

Des sédiments argileux se déposent dans un milieu calme et ouvert vers le large, correspondant à un environnement de plate-forme marine.

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Vers 300 millions d’années, la formation de la chaine de montagnes varisque, à l’origine du Massif armoricain, entraine le plissement des couches de sédiments déposées.

La pression exercée sur les sédiments argileux les compactent et les transforment en schistes. Après des périodes successives d’érosion et de dépôt, cette formation de 180m d’épaisseur se retrouve à l’affleurement.

L’ardoise est un matériau naturel résistant et impénétrable, employé traditionnellement, depuis des siècles, pour la couverture des bâtiments. De nos jours, la toiture en ardoise est encore très répandue dans la Sarthe.

Dans la région, on trouve des traces de l’utilisation de l’ardoise dès le Moyen-Âge. Au XIXe siècle, une extraction à ciel ouvert est mentionnée à moins d’un kilomètre d’ici, non loin de la Maison Neuve (Pommereuil).

Les schistes ardoisiers résistants et à débit régulier sont exploités pour la couverture de bâtiments. La durée de vie d’une ardoise est de 70 à 300 ans selon son épaisseur et sa qualité ainsi que son type d’extraction et sa technique de pose (clou ou crochet).

Le toit de l’église Notre-Dame de Ségrie (cf. arrêt n°10) est un bon exemple de couverture traditionnelle en ardoise avec une pose à pureaux (partie visible des ardoises) décroissants des parties basses aux parties hautes.

L’ardoise sert aussi en parement protecteur et en dallage.

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Revenir sur la route, longer la carrière du Châtelet pour après l’entrée de cette dernière prendre sur la gauche le chemin qui suit sa clôture jusqu’au belvédère aménagé pour avoir une pleine vision sur l’exploitation.

Arrêt n°8-

Panneau 5- La carrière (grès quartzite et cinérites)

Cette carrière en activité exploite des grès et des roches volcaniques d’âge cambrien pour la production de granulats, ceci depuis plus d’un siècle.

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Le grès quartzite est une roche sédimentaire gris-rose, formée en majeure partie de quartz.

Il est associé dans la carrière à des roches verdâtres à grains fins, d’origine volcanique. Ces roches appelées cinérites sont intercalées principalement au sommet de la formation gréseuse épaisse de 400 mètres.

Il y a environ 530 millions d’années, au Cambrien, des sables se déposent dans une mer peu profonde, près du littoral.

A cette époque, la région est le siège d’une intense activité volcanique. Les centres éruptifs sont localisés dans des structures de type caldeira (dépression circulaire), dont le diamètre avoisine les 20 kilomètres.

Ce sont des volcans explosifs dont les produits émis sont des pyroclastites, des cendres et des ponces, mais aussi des coulées de lave et de boue. Ces dépôts s’intercalent dans les sables. En se cimentant, les sables vont devenir des grès (Grès de Sainte-Suzanne) et les cendres, en se consolidant, des cinérites.

La formation de la chaine de montagnes varisque (300 millions d’années) et l’érosion vont effacer la morphologie volcanique.

Pour en savoir plus sur cet important épisode volcanique : https://sgmb.univ-rennes1.fr/vie-associative/excursions/12-excursions/46-maine

La carrière à ciel ouvert du Châtelet, à Ségrie, est un exemple d’exploitation actuelle du grès quartzite. La production annuelle de granulats y est de l’ordre de 450 000 tonnes.

L’exploitant commence par décaper la terre de couverture qui est mise en merlon pour délimiter la carrière et sera réutilisée pour le réaménagement à la fin de l’exploitation. La roche est ensuite extraite à l’explosif par paliers de 15 mètres de hauteur. Les blocs sont transportés jusqu’à l’unité de traitement, concassés et criblés, puis triés par granulométrie et pour certains produits lavés, avant leur stockage au sol ou en trémie.

A partir du grès quartzite, l’exploitant produit différents tailles de granulats : sables, graviers et graves, destinés principalement au BTP, à la filière du béton ainsi qu’aux particuliers.

Les matériaux de la carrière Cemex à Ségrie ont été utilisés pour de grands chantiers comme le parc éolien des communes de Juillé-Placé-Vivoin, le Théâtre du Mans, la déviation de Fresnay-sur-Sarthe, le tram du Mans et la LGV du Mans.

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Il faut noter la remarquable mise en valeur pédagogique du site par l’aménagement d’un belvédère qui permet l’observation de l’exploitation tout en préservant la sécurité des visiteurs ainsi que plus généralement de la prise en compte de son environnement général : le voisinage, l’eau, les oiseaux (chouettes effraies, faucons crécerelles), batraciens (crapauds sonneurs à ventre jaune)…Récemment, a été installé sur une paroi, en partenariat avec la LPO, un nichoir pour le faucon pèlerin, cette espèce étant régulièrement présente sur le site.

Pour les amateurs d’ornithologie, un observatoire est à la disposition des visiteurs lors des horaires d’ouverture de la carrière.

Revenir sur la route et, avant d’atteindre le Souci, prendre à gauche vers la Juillerie puis les Plantes par une route au long de laquelle affleure le calcaire et qui offre de beau panorama vers le Nord jusqu’à rencontrer une route qui descend des Bercons.

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Arrêt n°9- Croix cote 99

(à 10 m au nord du croisement)

Croix en grès roussard.

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Aller à droite sur près de 100 mètres pour continuer vers la Touche Godard et continuer tout droit vers Ségrie jusqu’à la D 5 (rue Pierreuse) après avoir franchi l’ancienne voie ferrée et le Souci.

Au long de la rue Pierreuse il est possible de trouver de belles constructions en roussard mais l’édifice qui accroche le regard est incontestablement l’église du village.

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Arrêt n°10- Notre-Dame de Ségrie (XIIIe siècle)

L’église est classée au titre des Monuments historiques depuis le 17 Décembre 1912. Cet édifice du XIIIe siècle en calcaire et en grès roussard typique de la région a été construit, selon la légende, grâce à la générosité de la reine Berthe.

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Le clocher est une tour rectangulaire avec un toit en bâtière. Les fenêtres en plein cintre, le portail, les contreforts, les cordons moulurés, les modillons sculptés s'apparent au style Roman. A noter sur le remarquable portail, une rare représentation de comète. A l'intérieur, les voûtes bombées sont sur croisée d'ogive. Les vitraux du XIXe siècle ont été réalisés par Rathouis, maitre verrier du carmel du Mans.

Sur le contrefort sud-est on notera la présence d’une ancienne plaque de cocher indiquant diverses distances kilométriques.

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Jean Plaine

[sentier parcouru le 24 Avril 2016]

Texte rédigé à partir des informations figurant sur les panneaux.

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