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Ouessant (29)

La sortie du 6-7.09.2008 à l'île d'Ouessant, Finistère
                                   



Sortie animée par Jean-René Darboux, Université de Bretagne occidentale, Brest
      

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Samedi 06.09.2008

C'est par un temps pluvieux et maussade que nous avons pu subir la traversée "Le Conquet-Molène-Ouessant". Après un petit "briefing", l'excursion a commencé sous la pluie et le vent, caractéristiques de l'île d'Ouessant.

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Arrivée époustoufflante sur l'île dans la tourmente des vagues et du vent, mais tout de suite travaux pratiques sur le premier site (1/1 sur la carte) à proximité du port du Stiff.

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Fig.1- Carte géologique de l'’île d'Ouessant avec les différents arrêts (1/1 à 1/8 dans la partie nord, 2/1 à 2/5 dans la partie sud) (Chauris et Hallégouet, 1994)

La géologie d'Ouessant présente essentiellement des micaschistes et des granites cisaillés par une série de failles NE-SW à E-W (Fig.1). L'île est composée de 2 parties géologiques: nord (1/) et sud (2/). Le nord présente différents granites dont certains sont très déformés par un cisaillement ductile senestre. Ce cisaillement est antérieur à la mise en place de filons de microsyénite.

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"Trondhjémite" et pli dans des micaschistes (proche de l'arrêt 1/1).

Il s'agit d'une puissante intrusion sodique à affinité trondhjémitique (Chauris, 1992) dans les micaschistes de la baie du Stiff (arrêt 1/1). La roche grenue, massive, renferme des panneaux de micaschistes parfois très déformés, présentant les uns le statut d'enclaves (ici plissées), les autres celui d'écailles insérées tectoniquement.

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Les gneiss migmatitiques et les micaschistes (1/2 sur la carte) de la pointe de Kadoran.

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Fig.2- Carte structurale d'Ouessant et relation avec la partie continentale, montrant le mécanisme de déformation ductile du granite par cisaillement senestre.

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Sur les granites déformés (plan C/S, arrêt 1/2) avec mélanges magmatiques à la pointe de Kadoran.

A la pointe de Kadoran (arrêt 1/2), on distingue le granite gris, à grain moyen, présentant une structure composite associant plans de cisaillement C et plans de schistosité S, signant une déformation ductile en régime de décrochement senestre (cf Fig.2) dans la direction N70° des plans C. On note la présence d'une roche sombre, à grain fin, de composition granodioritique (Chauris, 1994) dont le statut (enclaves ou filons) pourra être discuté.

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Leucogranite de Lokeltas fracturé avec variation de granulométrie (arrêt 1/4).

La baie de Béninou (arrêt 1/3) est creusée dans un granite à 2 micas, à grain fin à moyen, à l'orientation très fruste voire inexistante.

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Filon de microsyénite, boudinage et microplis entre les arrêts 1/5 et 1/6

En baie de Calgrac'h (arrêt 1/4), on y retrouve le granite de Kadoran, outre les caractéristiques structurales déjà observées à la pointe éponyme (1/2), ces affleurements livrent de nombreux indices en faveur d'un mélange magmatique.

Dans le port Kenzi (arrêt 1/5), le granite de Kadoran très folié (au Nord) et celui de Néninou peu déformé (au Sud) sont séparés par une bande de gneiss et micaschistes, subverticale, d'une largeur de 100 à 200 m, qui s'allonge depuis Yusin, à l'Ouest, jusqu'à Kadoran, à l'Est, dans une direction WSW-ENE conforme à la structuration régionale.

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Paysages divers de l'île d'Ouessant. Entre vent (moulin) et matériaux de construction (plage à galets spectaculaire!).

Dans le secteur du Créac'h (arrêt 1/6), le littoral NW expose un granite à 2 micas, assez grossier, qui arme l'unité septentrionale courant de Bac'haol à l'Est, à la pointe de Pern à l'Ouest, sur 8 km environ. Ce granite de Lokeltas (Chauris, 1994) très déformé sur les bordures N et S, en régime de décrochement ductile senestre, a fait l'objet de mesures radiométriques ayant livré des âges de 303 ± 5 Ma et 309 ± 5 Ma (Leutwein et al., 1969). Quelques filons de microsyénites (Chauris, 1994) nettement sécants et postérieurs à la déformation du granite ont été datés à 286 ± 14,5 Ma (Bellon et al., 1985).

A la pointe de Pern (arrêt 1/8), le granite de Lokeltas non orienté et les spectaculaires levées de galets ont marqué la fin de la journée sous une pluie battante!

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Un petit moment de détente pour souffler au chaud ... après une bonne marche (une douzaine de km pour les plus courageux).

Dimanche 07.09.2008

En baie de Lampaul, une bande de cataclasites, puissante de 250 m environ, développée aux dépens d'un granite rose porphyroïde est installée entre le granite de Lokeltas au Nord et les micaschistes de Lampaul au Sud. Ces micaschistes polydéformés admettent quelques intrusions sodiques à affinité trondhjémitique microgrenues (Chauris, 1992).

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Baie de Lampaul (1/8, 2/1). Granite rose cataclastique et micaschistes présentant du quartz plissé.

En baie de Lampaul (arrêt 2/1), la structure et la lithologie des micaschistes du domaine central peuvent être observées.

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Plage quaternaire.

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Plis en chevron dans les micaschistes (2/2) et plis d'un filon de quartz et de granite à la pointe de Pen ar Gored.

A la pointe de Pen ar Gored (arrêt 2/2), superposition de déformations dans les micaschistes à muscovite injectés de lames granitiques.

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Moment de détente, casse-croûte autour d'un filon sous la "surveillance" des cormorans.

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Effondrement gravitaire le long de la côte sud, filons d'aplite (arrêt 2/3) et micaschistes à muscovite (arrêt 2/4)

A la cale de Penn ar Roc'h (arrêt 2/3), le littoral Sud de l'île se développe sur une bande de granite à biotite, à grain grossier, parfois porphyroïde, affleurant depuis la pointe de Penn ar Gored à l'Ouest, jusqu'à celle d'Arlan à l'Est. Ce granite de Porzguen (Chauris, 1994) lardé de filons est bien exposé à la cale de Pen ar Roc'h. Tandis qu'à l'Anse d'Arlan (arrêt 2/4), il existe des relations entre le granite de Porzguen et les micaschistes à musciovite encaissants.

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Panorama de la baie du Stiff (arrêt 2/5)



La falaise septentrionale qui surplombe le port montre, sur un panorama exceptionnel par sa beauté et ses couleurs éclatantes, un contact tectonique (décro-chevauchement senestre) visible entre la trondhjémite grenue du Stiff (1/1) et les micaschistes encaissants.

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Entre un paysage insolite sculpté par les vents et les moutons typiques d'Ouessant, l'île attire toujours les touristes.

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Embarquement et retour sur le continent dans la bonne humeur....

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Texte: T. Aïfa
Clichés: T Aïfa, D. Guérin, H. Masquelin            


Bibliographie:

Bellon H., Chauris L., Fabre A., Hallégouët B., Thonon P., 1985. Age du magmatisme fissural tardi-hercynien à l'extrémité occidentale du Massif armoricain (France). C.R. Acad. Sci. Paris, t.301, série II, 297-302.

Chauris L., 1991. Le granite porphyroïde de Porzpaul dans l'île d'Ouessant: un nouvel élément dans la ceinture des "granites rouges" du Massif armoricain (France). C.R. Acad. Sci. Paris, t.315, série II, 245-250.

Chauris L., 1992. Intrusions sodiques à affinité trondhjémitique dans le Nord-Ouest de la Bretagne (France). C.R. Acad. Sci. Paris, t.315, série II, 705-710.

Chauris L., Hallégouët B., 1994. Feuille Plouarzel-île d'Ouessant à 1/50.000, BRGM, Editions du Service géologique national.

Leutwein F., Chauris L., Sonet J., Zimmerman J.L., 1969. Etudes géochronologiques et géotectoniques dans le Nord Finistère (Massif armoricain). Sciences de la Terre, Nancy, t.XIV, n°4, 329-358.

 

Veryac'h Camaret (29)

La sortie du 15.09.2007 à Camaret-sur-Mer, Finistère
                                   

La coupe du Veryac’h : les paléoenvironnements marins de l’Ordovicien au Silurien


Sortie animée par Arnaud Botquelen, (Université de Bretagne occidentale, Brest)
et
Yves Cyrille (Maison des minéraux, Crozon)

      

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yvescyrille

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Pour cette sortie d’après été, une trentaine de personnes étaient présentes au rendez-vous de la pointe de Pen Hir (Fig.1), toute enveloppée de brouillard et de bruine.
Difficile dans ces conditions de faire une lecture du paysage à partir des explications sur la géologie régionale fournies par les animateurs au pied du monument.
Heureusement la suite de la journée se révélera plus favorable à l’observation en pied de falaise dans l’anse du Veryac’h (ou Veryarc’h).

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Fig.1- Carte de la presqu’île avec localisation géographique de la coupe du Veryac’h

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Les explications (non embrumées!) sur le grès armoricain de la pointe de Pen Hir


Présentation de la coupe :

La coupe du Veryac’h à Camaret-sur-Mer en presqu’île de Crozon est une référence mondiale pour l’Ordovicien et la base du Silurien.
Cette coupe que l’on peut visualiser depuis la pointe de Pen Hir, permet d’observer en continu (avec cependant quelques accidents tectoniques) l’empilement de 6 formations géologiques, de l’Arenig (Ordovicien inférieur) au Ludlow (Silurien supérieur), soit plus de 50 millions d’années d’archives sédimentaires marines et paléontologiques (Fig.2). Elle sera complétée à l’est par la coupe de Lamm Saoz.

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Fig.2- Carte géologique de la partie ouest de la presqu’île avec situation de la coupe du Veryac’h.
Les numéros renvoient à ceux portés sur la photo ci-dessus.

Le Veryac’h est tout naturellement une localité idéale pour l’étude complémentaire de la paléoécologie benthique et de la dynamique sédimentaire dans le temps.

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Fig.3- La succession tardi-Protérozoïque et Paléozoïque inférieur en presqu’île de Crozon (d’après F. Paris)

Les formations :

L’extrémité ouest de la plage du Veryac’h se caractérise par le passage entre la Formation du Grès armoricain observée à la pointe de Pen Hir et la Formation de Postolonnec.

Les grès armoricains sont riches en lingules (brachiopodes inarticulés) et traduisent un milieu de sédimentation de type plate-forme détritique peu profonde (âge : Arenig supérieur).

Au dessus de la Formation du Grès armoricain, le membre inférieur de la Formation de Postolonnec (âge : Llanvirn inférieur) livre de nombreux graptolites, trilobites, brachiopodes, échinodermes et bivalves. Ces fossiles benthiques sont dispersés dans les schistes ou plus fréquemment concentrés dans les nodules.

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Sur la Formation de Postolonnec, observation des horizons à nodules phosphatés et des niveaux "transgressifs" (bancs de grès)

Des horizons à nodules et croûtes phosphatés sont actuellement à l’étude et leur formation semble être en relation avec des périodes de remontée du niveau marin (transgression). Le milieu de sédimentation est une plate-forme détritique située entre la limite d’action des vagues normales et la limite d’action des vagues de tempête (le domaine «d’offshore»).

La Formation de Kerarvail (âge : Llanvirn moyen) est mal exposée au Veryac’h (voir la coupe de Postolonnec). On l’observe un peu au-delà vers l’est de l’escalier de descente à la plage où elle est déformée. Il s’agit d’un grès à tendance psammitique avec des lamines entrecroisées et des chenaux peu fossilifères.

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La Formation de Kerarvail entre les membres inférieur et supérieur de la Formation de Postolonnec

Le membre supérieur de la Formation de Postolonnec (âge : Llanvirn supérieur et début du Caradoc) présente des horizons à nodules siliceux dont l’analyse séquentielle permet de reconstituer les variations du niveau marin relatif (stratigraphie génétique). La faune benthique y est bien représentée avec des trilobites, brachiopodes, échinodermes (crinoÏdes), bivalves et gastéropodes.
Les gisements fossilifères se présentent sous forme de fines concentrations coquillières (probablement dues aux tempêtes de forte énergie) ou sous forme de nodules.
Au passage des schistes à la formation sus-jacente de Kermeur on trouve un banc métrique d’oolithes ferrugineuses et phosphatées à acritarches et chitinozoaires, véritable marqueur international lithostratigraphique et biostratigraphique. Le milieu de sédimentation est semblable à celui décrit pour le membre inférieur de la Formation de Postolonnec.

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Le membre supérieur de la Formation de Postolonnec avec ses horizons à concentrations coquillières et ses nodules

La Formation de Kermeur (âge : Caradoc) débute avec une dizaine de mètres d’argilites et de grès psammitiques, bioturbés à brachiopodes, trilobites et cystoïdes. Ces grès témoignent d’un milieu de sédimentation peu profond et abrité. Ensuite, le grès devient nettement stratifié et alterne avec des schistes contenant une microfaune de chitinozoaires.
Le milieu de sédimentation est franchement marin dominé par l’activité de la houle permanente et les vagues de tempête.

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La zone de passage entre la Formation de Postolonnec et la Formation de Kermeur
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La Formation de Kermeur offre une superbe succession de bancs grèseux et argileux fortement redressés

La Formation du Cosquer est classiquement divisée en 3 membres où l’on voit se succéder des argilites noires avec des lamines gréseuses contenant des galets polyédriques (sédimentation glacio-marine), des blocs glissés (glissements sous-aquatiques ou « slumps ») et des figures de charge (structure « Ball and Pillows »).
L’interprétation de cette formation est encore débattue aussi bien en terme de chronologie des dépôts que de milieu de sédimentation...

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La Formation du Cosquer avec ses structures syn-sédimentaires

La Formation de Lamm Saoz (âge : Ashgill terminal) est constituée de grès jaune avec des joints de schistes sombres contenant une microfaune de chitinozoaires.

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Les grès de la Formation de Lamm Saoz

La Formation de la Tavelle se caractérise par des ampélites pyriteuses tectonisées riches en graptolites. Il y a ensuite un contact faillé avec des ampélites à nodules calcaires et à petits
bancs de quartzites contenant également des graptolites caractéristiques du Ludlow.

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Les ampélites de la Formation de la Tavelle contiennent des graptolites (Monograptidés)

On retrouve la Formation du Cosquer en écaille tectonique pour ensuite découvrir des schistes à quartzites noirs se terminant par un niveau à nodules calcaires contenant des graptolites, des bivalves et des nautiloïdes. Le milieu de sédimentation est une plate-forme peu profonde et anoxique.

Ensuite s’observe un des chevauchements majeurs de la presqu’île de Crozon où le Silurien est en contact avec le Dévonien inférieur (Lochkovien-Praguien) c’est-à-dire avec les formations des Schistes et Calcaires de l’Armorique et des Grès de Landévennec.

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Les schistes et calcaires de la Formation de l'Armorique renfermant coraux et autres brachiopodes se sont déposés
alors que le massif armoricain se situait sous les tropiques

 


Texte : Arnaud Botquelen et Jean Plaine
Clichés : Jean Plaine

Nota : La coupe du Veryac’h fera l’objet d’un prochain article dans un Bulletin de la Société géologique et minéralogique de Bretagne.

Orientation bibliographique

BOTQUELEN A., LOI A., GOURVENNEC R., LEONE F. & DABARD M.-P. 2004- Formation et signification paléo-environnementale des concentrations coquillières : exemples de l’Ordovicien de Sardaigne et du Dévonien du Massif armoricain. C.R.Palevol,3,353-360.

BOTQUELEN A. & MELOU M. 2007- Caradoc Brachiopods from the Armorican Massif (Northwest France). J.Paleont., 81 (5), 1080-1090.

BOURAHROUH A. 2002- Chitinozoaires et palynomorphes de l’Ordovicien supérieur nord gondwanien ; impact de la glaciation ashgillienne. Thèse de Doctorat, Université de Rennes, 180p. (non publiée).

CHAUVEL J.-J. & PLUSQUELLEC Y. 1987- Découverte géologique en presqu’île de Crozon, éditions Ouest-France, 32p.

DEUNFF J. 1954- Verhyachium, genre nouveau d’Hystrichosphères du primaire. C.R.somm.Soc.géol.France,13,227-228.

DEUNFF J. 1958- Microorganismes planctoniques du primaire armoricain I- Ordovicien du Verhyac ‘h (presqu’île de Crozon). Bull.Soc.géol.minéral.Bretagne, nouv. sér. 2 : 1-42 (1959).

HAMOUMI N. & THONON P. 1991- la sédimentation au cours de l’Ordovicien supérieur en presqu’île d e Crozon (Massif Armoricain, France) : contrôle climatique (glaciation), volcanique et tectonique (distension),39-67. In Livre des excursions du 3ème Congrès Français de Sédimentologie, Association des Sédimentologistes français, Brest.

LARDEUX H. 1996- Guide géologique de la Bretagne, (3ème édition), Masson éd. Itinéraire 10b, p.136 à 139.

LOI A. & GUILLOCHEAU F. 1995- A tentative model of the restricted plateforms deposits : the Upper Ordovician Kermeur Formation of Western Brittany (France). 16th Regional European Meeting – 5ème Congrès Français de Sédimentologie, Aix-les-Bains, France, 24-26 Avril 1995,p.95.

LONG D.G.F. 1991- A non-glacial origin for the Ordovician (middle Caradocian) Cosquer Formation, Veryac’h, Crozon peninsula, Brittany, France. Geological Journal,26,279-293.

PARIS F. & LE HERISSE A. 1992- Paleozoic in Western Brittany (outline of the armorican geological history and geological itinary in the Crozon Peninsula). Cahiers de Micropaléontologie,7,5-28.

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Volcans en Crozon (29)

La sortie du 7.10.2006 à Crozon

                                     

Le volcanisme de la presqu’île de Crozon


Sortie animée par Martial Caroff (Université de Bretagne Occidentale, Brest)
      

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A l’invitation de notre association, un peu plus d’une soixantaine de personnes se sont retrouvées au rendez-vous de Tal-ar-Groas, désormais habituel lorsqu’il s’agit d’une sortie dans la presqu’île de Crozon, pour une journée consacrée à la présentation de son volcanisme paléozoïque.
Des études récentes, bouleversant quelque peu les conceptions anciennes, montrent que les affleurements ordoviciens souvent visités des falaises de la presqu’île offrent une remarquable variété de produits volcaniques mis en place en milieu sous-marin peu profond. Parmi ces affleurements, ceux de l’Aber-Raguenez et ceux de Lostmarc’h-Porzig, particulièrement démonstratifs, ont été retenus pour cette sortie.

>> Une étude complète de ce volcanisme (Juteau et al.) fera l’objet d’un long article très documenté dans un prochain bulletin de la Sgmb.

Présentation

La presqu'île est constituée de deux unités tectoniques, dites "Unité de Crozon Nord" et "Unité de Crozon Sud". Ces deux unités se sont vraisemblablement juxtaposées lors de l'orogenèse hercynienne, par l'intermédiaire d'accidents tectoniques de type coulissage et/ou charriage, le contact se faisant suivant un grand accident chevauchant allant de Lostmarc'h à Châteaulin, l'unité "Crozon Nord" chevauchant l'unité "Crozon Sud". Ce chevauchement est aujourd’hui connu sous le nom de "cicatrice Crozon Nord - Crozon Sud " (Rolet et al., 1984).
Ce contact est jalonné sur toute sa longueur par des écailles de roches volcaniques et de roches microgrenues basiques qui appartiennent à l'Unité de Crozon Sud.
Le volcanisme apparaît donc limité à la série Crozon-Sud dont il constitue la principale originalité. Il y apparaît en affleurements discontinus, tectonisés et écaillés, alignés parallèlement au contact anormal qui sépare les deux unités (Fig.1).

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Figure 1- Situation des deux unités de Crozon Nord et de Crozon Sud et de l’accident tectonique chevauchant qui les sépare (d’après Rolet et al. 1984)

Historique

La mise en évidence de ce volcanisme ordovicien en presqu’île de Crozon est due à Charles Barrois qui en a donné une première description en 1889, dans un mémoire quelque peu malencontreusement intitulé “ sur les éruptions diabasiques siluriennes du Menez-Hom ”. Ce relief de grès armoricain qui en impose à l’entrée de la presqu’île n’a en effet rien d’un volcan, les formations éruptives se trouvant en contrebas du sommet, le long de l’Aulne (Trégarvan).
A la suite de Barrois, Lucas (1938) a étudié le complexe intrusif de l'Ile de l'Aber et de Raguenez, et il revint à son élève Fourmond (1964) d'avoir su identifier à la Pointe de Lostmarc'h un volcanisme sous-marin comportant des coulées à débit en pillow-lavas, et d'avoir réalisé la première étude de terrain précise de la pointe de Kerdreux. Par la suite Maillet (1977) et Cabanis (1986) ont étudié la géochimie des volcanites de Crozon pour en donner les caractéristiques principales.
Depuis le début des années 2000, une série de mémoires de Maîtrise en Sciences de la Terre de l'Université de Bretagne Occidentale apporte de nombreuses descriptions nouvelles sur les roches volcaniques et sub-volcaniques sous-marines d'âge ordovicien exposées dans les falaises de la presqu'île.

Les différents arrêts (Fig.2)

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Figure 2- Carte de la presqu’île avec emplacement des différents arrêts

A partir de Tal-ar-Groas descendre au sud vers le site de l’Aber. Juste après le franchissement de la rivière stationner à gauche.

Arrêt n°1- Le Four à Chaux de Rozan- l’Aber (Crozon)

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Les premiers affleurements, juste au-dessus de la zone de stationnement, montrent des carbonates tandis qu’à l’ouest, plus près du four à chaux, dans une ancienne carrière, sont visibles des schistes et des calcaires accompagnés de manifestations volcaniques basiques d’affinité basaltique.
Celles-ci forment ici une coulée d’environ 5 mètres de puissance dont le débit en coussins (pillow-lava) est caractéristique d’un épanchement en milieu aqueux, sans doute marin.

 

Les coussins de lave sont de grande taille (60cm à 1,20m) ; ils s’organisent sur plusieurs niveaux qui correspondent à des venues successives. Ils sont cimentés par des calcaires bioclastiques et des sédiments à forte composante volcanique : tuffites et épiclastites. Ils sont fortement altérés, mais on y reconnaît la bordure vitreuse et de nombreuses vacuoles disposées à leur périphérie.
A la cassure, on observe une roche de couleur sombre (mésocrate), parcourue de veines de calcite mises en place dans les fractures, riche en vacuoles remplies de calcite ou d’argile. La texture est isotrope microlitique, vacuolaire, riche en verre ; les plagioclases, par leurs terminaisons bifides, traduisent le refroidissement très rapide de la lave par phénomène de trempe dans l’eau de mer. Quelques fantômes de minéraux colorés (olivine et pyroxène) sont reconnaissables.

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Le débit en coussins et la présence de calcaires francs associés traduisent une mise en place dans un environnement marin carbonaté.
Cet ensemble appartient à la Formation des Schistes et Calcaires de Rosan dont l’âge est Ordovicien supérieur, la base de la coupe se plaçant dans le Caradoc supérieur tandis que son sommet appartient à l’Hirnantien (anciennement Ashgill pro parte).
Les carbonates ont été largement exploités pour la fabrication de la chaux, ce qui explique l’implantation ici d’un four à chaux édifié en 1839.

Poursuivre sur une centaine de mètres vers le sud pour rejoindre le parking du site de l’Aber.
A pied, prendre le sentier qui longe le littoral en direction de l’Île de l’Aber et de la Pointe de Raguenez.

Arrêt n°2- Pointe de Raguenez (Crozon)

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La partie basse de l’estran montre des grès fins et des schistes qui correspondent à la Formation des Grès de Kermeur datée à 450 millions d’années (Caradoc).
Ces sédiments sont accompagnés de filons plurimétriques (au nombre de trois) d’une roche de couleur beige de nature basaltique (dolérite ou diabase) assez aisément identifiables parce qu’ils sont mis en relief par l’érosion.

Ces filons sont souvent très riches en petites vacuoles plurimillimétriques de couleur sombre, arrondies ou fluidales, parfois organisées en essaims. Sous le microscope, elles apparaissent constituées de produits secondaires.
Leur origine et leur mode de formation ne sont pas encore aujourd’hui clairement expliqués (bulles de dégazage ?).
Par définition intrusifs, ces filons sont clairement parallèles à la stratification des grès ou des schistes. Ils correspondent donc à des sills (= filons-couches).
L’étude du contact entre ces sills et les sédiments permet d’intéressantes observations: il est souvent lobé, en “ doigts de gant ” ; on y trouve parfois des vésicules en tubes (" pipe vesicles ") développées dans le magma, perpendiculairement au contact, voire même de "mini-pillows" sphériques avec hyaloclastites à l'extrémité de certains d’entre eux. Tous les sills ont des bordures figées et des amygdales.
L’ensemble de ces observations converge pour affirmer que ces intrusions basaltiques se sont mises en place alors que les sédiments étaient encore meubles et passablement gorgés d’eau.

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Au-dessus d’un niveau de calcaire fossilifère, de 2 mètres d’épaisseur, véritable “ bouillie ” à bryozoaires et crinoïdes, on reconnaît la Formation des Tufs et Calcaires de Rosan dans des brèches volcaniques qui constituent le haut de l’estran et la petite falaise. La coloration générale de la formation est ocre à brunâtre.

Ce sont des brèches pyroclastiques, localement bien structurées, avec des alternances de lits fins, parfois à litages obliques, et de bancs plus grossiers, parfois lenticulaires, parfois plus chaotiques, qui contiennent une grande quantité de ponces de teinte blanchâtre dont la taille varie de celle du lapilli (2 mm à 64 mm) à celle de la bombe (supérieure à 64 mm). Les bombes sont souvent pluridécimétriques (jusqu'à 40 cm). Les figures d’impact ne sont pas rares.
Ces blocs majoritairement anguleux, de couleur claire, en général très vacuolaires, fortement altérés, et qui ont longtemps été considérés comme de nature acide, sont en fait de la lave basaltique fortement dévitrifiée et secondairement silicifiée comme l’indiquent les analyses chimiques confortées par les observations en lames-minces dans lesquelles on discerne des fantômes d’olivine et de pyroxène (Lamour, 2000 ; Nonotte, 2002).
La matrice contenant ces ponces est un verre volcanique chloriteux brun-verdâtre, dévitrifié et recristallisé. Il renferme une grande quantité de fragments anguleux noirs fluidaux (anciens clastes vitreux) et des fragments clairs lithiques de lapillis arrondis à texture microlitique. Cette matrice correspond à la définition d’une hyaloclastite.

Au-dessus, la série de brèches pyroclastiques à ponces claires se poursuit, avec quelques puissantes lentilles de brèches à ponces chaotiques, dépourvues de toute stratification, et recoupées par quelques sills de lave basique sombre à bordures lobées.

Toutes ces brèches apparaissent primaires, non remaniées.

Ainsi, les formations volcanoclastiques de l’Aber s’avèrent être des roches pyroclastiques générées par des explosions phréatiques ou phréato-magmatiques, issues de l’interaction entre un magma basaltique et l’eau.

La dernière partie de la séquence montre des tuffites et des cinérites bien litées, bimodales, avec de plus en plus de fragments de lave noire basaltique à contours déchiquetés qui deviennent prépondérants par rapport aux ponces de couleur claire. La plupart des lits ponceux montrent un granoclassement inverse, et chaque banc à granoclassement inverse est suivi par un banc beaucoup moins épais de cinérites finement stratifiées. Ce type de succession, entre des unités ponceuses à granoclassement inverse (tufs à lapillis) et des unités cinéritiques primaires, est caractéristique des dépôts dus à des coulées pyroclastiques en milieu sub-aquatique.

On peut alors envisager l’existence d’un magma basaltique relativement visqueux et très riche en gaz pour expliquer les deux types de pyroclastes que l’on rencontre dans la série volcano-sédimentaire: ponces claires vacuolaires et lapillis vitreux noirs de forme fluide. Lors de son arrivée en surface, le magma vaporise l’eau contenue dans les sédiments, ce qui provoque des explosions extrêmement violentes. Le magma, sous la pression du gaz qui se détend brutalement, va se fragmenter et des ponces basaltiques très vésiculées vont alors être formées. Les petits lapillis vitreux peuvent avoir deux origines: fragments pauvres en gaz car ayant une origine plus profonde dans le réservoir, ou bien, et c’est plus probable, fragments de lave pulvérisés par les explosions très puissantes caractéristiques d’une éruption phréato-magmatique. Nous serions donc en présence d’éruptions sous-marines explosives violentes sous faible tranche d’eau, de type surtseyen.

Le dynamisme surtseyen, mis en évidence à Surtsey, une île volcanique née il y a plusieurs dizaines d’années au large de l’Islande, est caractéristique des éruptions sous-marines de faible profondeur. Le magma chaud se retrouve au contact de l'eau et les gaz qu'il renferme se libèrent dans un bouillonnement. Ce contact avec l'eau engendre de violentes explosions. Généralement, la lave émise est réduite en cendres. Gorgées d'eau, ces cendres sont projetées dans des panaches en forme de cyprès particulièrement noirs.

En remontant le cours de l’Aber, en direction de la route côtière, on trouve un filon de quartz accompagné de jaspes et de minerai de fer carbonaté altéré en limonite.
Il n’est pas impossible que cet accident siliceux ait une relation avec l’épisode de silicification (hydrothermale ?) des ponces contenues dans les brèches pyroclastiques.

Remonter vers le rond-point de Tal-ar-Groas pour prendre à gauche la direction de Crozon.
Contourner par le nord le centre de la ville en direction de Camaret-sur-Mer. Dépasser la route qui part à droite vers Roscanvel et, au carrefour suivant, tourner à gauche en direction du centre-ville et de Morgat.
Au rond-point suivant prendre immédiatement sur la droite la première route (D 308) en direction de la Pointe de Dinan.
Après environ 4 kilomètres, aller à gauche.
Laisser sur la droite le village de Tromel et, au carrefour suivant, partir à droite vers Kernaléguen. Traverser ce village pour aller vers Lostmarc’h tout en restant sur la ligne de crête. Stationner juste avant les premières maisons du village.
A pied, traverser Lostmarc’h pour prendre le chemin qui descend vers la pointe.
Franchir les deux talus de l’éperon barré, rejoindre la ruine.

Arrêt n°3- Pointe de Lostmarc’h (Kastell Lostmarc’h) (Crozon)

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La pointe de Lostmarc’h est limitée au nord et au sud par deux éperons rocheux séparés par une profonde échancrure constamment soumis aux assauts des vagues.
Toute cette zone est tectoniquement complexe, parcourue par de nombreuses failles est-ouest chevauchantes vers le sud, qui affectent à la fois la formation ordovicienne des Tufs et Calcaires de Rosan et des formations siluriennes schisteuses à dominante ampéliteuse.
On y distingue classiquement trois compartiments de roches volcaniques : éperon sud, zone centrale, éperon nord. Il faut y ajouter un quatrième compartiment au sud de l’éperon sud, reconnu il y a quelques années.

L’éperon nord, seul visité en cette journée, et dont l’accès peut se révéler délicat, est formé, sur une épaisseur de 15 mètres, par un spectaculaire empilement de pillow-lavas fort bien exposé au sud, qui constitue la célébrité géologique du site. Il est surmonté par des brèches de diverses natures : autoclastiques, pyroclastiques,...
La coulée de nature basaltique (lave sombre et fluide) offre un débit en masses arrondies pluridécimétriques qui se moulent plus ou moins étroitement les unes sur les autres ou bien sont cimentées par un calcaire blanc qui les met particulièrement bien en évidence. Les pillows en forme de tubes indiquent une polarité vers le nord.

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Cette architecture, bien différente du classique débit en prismes que l’on observe dans les coulées aériennes et qui traduit une cristallisation lente du magma est liée, au contraire, à un refroidissement rapide de la lave en milieu aquatique, véritable trempe du basalte au contact de l’eau de mer.
A la base de la coulée, les espaces entre les coussins sont remplis d’un abondant ciment calcaire blanc recristallisé, et la lave, chargée de bulles de calcite, contient de nombreuses enclaves carbonatées. Plus on va vers le nord de l'éperon, plus cette matrice se raréfie, et la lave aphanitique est complètement dépourvue d'enclaves et de bulles de calcite. Là encore, on peut penser que cette coulée sous-marine s'est répandue sur un fond marin formé d'une boue carbonatée non consolidée qu'elle a remis en suspension. La lave a englobé des fragments de calcaire et le fin sédiment calcaire s'est redéposé dans tous les interstices de la coulée. D'autres pillow-lavas sont venus ensuite par-dessus les premiers, qui n'ont pas été en contact direct avec les sédiments et n'ont donc pas été "contaminés". Ils se moulent étroitement les uns sur les autres, pratiquement sans matrice, à part un peu de hyaloclastites provenant de l'émiettement par friction de leurs bordures vitreuses.
Il s’agit bien de coulées épanchées en milieu marin comme le prouvent les organismes (coraux, crinoïdes) qui vivaient sur la boue calcaire perturbée par l’épanchement du magma basaltique.
Dans le ciment calcaire des coussins de lave, bien qu’il soit recristallisé, on observe de nombreux débris organiques parmi lesquels des trilobites, des brachiopodes, des crinoïdes, des bryozoaires, des ostracodes, des conodontes. Ce calcaire s'est déposé en mer calme, donc après l'arrêt complet des éruptions, comme le suggèrent des fragments intacts de tiges de crinoïdes. Une véritable lumachelle peut être observée par endroits, en placages sur le dos même de la coulée. Tous ces animaux vivaient dans la zone néritique, par des fonds de quelques centaines de mètres au maximum.

La lave, de couleur verdâtre, est un basalte spilitisé, recristallisé par métamorphisme hydrothermal. Il n’y a pratiquement plus rien de la paragenèse primaire. Les minéraux ferromagnésiens (olivine, clinopyroxène), sont pseudomorphosés en un mélange de chlorite et de calcite, et le plagioclase calcique est totalement albitisé. La mésostase vitreuse a recristallisé en un mélange de chlorite, d'oxydes de fer et de sphène.

L’éperon barré de Lostmarc’h

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La base de la pointe de Lostmarc’h est barrée par deux retranchements parallèles importants, des talus de terre. De profonds fossés sont creusés devant chacun d’entre eux.
Il s’agit d’une fortification protohistorique de l'âge du fer servant de refuge en cas de danger momentané.
Le site a été réutilisé au 18ème ou au 19ème siècle pour installer le corps de garde qui est aujourd’hui ruiné.

A pied, partir à l’est sur quelques dizaines de mètres et descendre au nord dans la crique de Porzig par un sentier en forte pente.

Arrêt n°4- Crique de Porzig (Crozon)

Juste au nord de la pointe de Lostmarc’h, la crique de Porzig expose sur son flanc sud de spectaculaires brèches d’explosion particulièrement bien mises en évidence sur les blocs éboulés et polis par la mer.

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Au contact de la coulée précédemment observée sur l’éperon nord de la pointe, on trouve une brèche autoclastique de pillow-lavas. Ces brèches passent ensuite à une unité de brèches magnifiquement litées et granoclassées, montrant une succession de niveaux rythmiques d'épaisseur décimétrique. Chaque séquence commence par un niveau grossier à éléments basaltiques sombres de taille pluri-centimétrique, aux formes déchiquetées, et passe progressivement vers le haut à des tuffites cendreuses fines, dont les éléments font moins de 2 mm de diamètre. Les bases de séquences sont parfois ravinantes. La matrice carbonatée blanche est abondante, analogue à celle des pillows observés précédemment.

L'interprétation de ces brèches a suscité de nombreuses discussions. S'agit-il de turbidites épiclastiques re-sédimentées, déposées sur les flancs de l'édifice volcanique ? Les belles séquences granoclassées avec figures de ravinement pourraient le laisser penser. L'examen des lames minces ne confirme pas cette hypothèse : non seulement les clastes sont extrêmement déchiquetés, mais ils sont souvent reliés les uns aux autres par de minces filaments de verre. Un dépôt de type turbiditique aurait dû arrondir les clastes, et surtout rompre les fragiles filaments vitreux. L'autre hypothèse consiste à voir dans ces dépôts des brèches pyroclastiques sous-marines formées par de violentes explosions à fleur d'eau. Les contours déchiquetés des clastes s'expliqueraient mieux. Un parcours aérien aurait permis aux clastes encore chauds et fluides de s'étirer en formant des filaments, et de retomber tels quels dans la boue sédimentaire.

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Les éruptions sous-marines explosives sous faibles tranches d'eau et leurs "gerbes cypressoïdes" caractéristiques sont essentiellement dues à l'expansion des gaz magmatiques et à la vaporisation instantanée de l'eau de mer au contact du magma. La lave, intensément fragmentée par les explosions dues à la détente des gaz magmatiques et de la vapeur d'eau de mer, retombe sous l'eau en formant des couches stratifiées de hyaloclastites d'explosion. On sait que de telles éruptions ont peu de chances de se produire au-delà d'une profondeur de 500 mètres.

La coupe se termine par un puissant niveau de calcaire massif et cristallin de dix à quinze mètres d'épaisseur, contenant de rares fragments reconnaissables de brachiopodes, de lamellibranches et de bryozoaires.
Au total, l'ensemble des coulées à pillow-lavas et des brèches volcaniques associées de Lostmarc'h représenterait une succession de moins de 200 m d'épaisseur. L'estimation est cependant délicate, compte tenu de l'importance de la tectonique.

Conclusion

Aujourd’hui, en presqu’île, il faut abandonner l’idée d’un volcanisme bimodal acide-basique. Le volcanisme ordovicien de Crozon est uniquement basaltique. Il s’est développé sous une tranche d’eau qui ne dépassait vraisemblablement pas quelques centaines de mètres, dans un domaine de plateforme continentale affectée par des mouvements tectoniques distensifs de type rift ou pré-rift.
Alors qu’au début de l’Ordovicien la sédimentation était détritique terrigène, elle devient franchement carbonatée durant toute la durée du volcanisme.
Les falaises de la presqu’île conservent la mémoire de la mise en place de ce volcanisme basique à 3 niveaux de profondeur :
- Un niveau profond avec des intrusions doléritiques, non observées lors de cette sortie, reconnaissables dans les sills de Kerdreux et de Kerdra, au sud de Lostmarc’h.
- Un niveau moins profond, subvolcanique, avec des sills et des dykes intrusifs dans des boues sédimentaires carbonatées encore meubles ou bien dans des tufs pyroclastiques (Raguenez, plage de Lostmarc’h).
- Un niveau superficiel avec les coulées à pillow-lavas et leur cortège de brèches autoclastiques, de hyaloclastites, épanchées au fond de la mer, sur et dans des sédiments carbonatés (pointe de Lostmarc’h, Porzig). Ces laves sont fortement spilitisées, sans doute par une intense circulation hydrothermale. De violentes explosions à très faible profondeur ont engendré des dépôts pyroclastiques bien stratifiés et souvent granoclassés.

La géochimie des dolérites (Terres rares, éléments incompatibles) montre que les volcanites de Crozon sont issues de magmas basaltiques proches des tholéiites continentales. Tout confirme que les laves se sont mises en place dans un contexte de rifting sur marge continentale amincie et en extension.

Il y a 460 millions d’années environ, le Grès armoricain se dépose sur les secteurs de Crozon Nord et Crozon Sud. Ce dernier est marqué par une forte subsidence.
Entre 460 et 455 Ma, se déposent les Schistes de Postolonnec, puis les Grès de Kermeur. Le contraste entre la plateforme stable de Crozon Nord et la forte instabilité de Crozon Sud s'accentue.
A l'Ordovicien supérieur (Fig.3), la sédimentation de plateforme se poursuit sur Crozon Nord avec le dépôt des Schistes et Grès du Cosquer, sans aucune trace de volcanisme, alors que simultanément un important volcanisme basaltique sous faible tranche d'eau se développe dans Crozon Sud, dans les sédiments carbonatés de la Formation de Rosan. Empruntant les failles normales d'un rift en formation, le magma basique s'injecte à plusieurs niveaux dans la série sédimentaire marine et débouche sur le fond marin, où il édifie à fleur d'eau des appareils volcaniques instables.

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Figure 3- Schéma de l’organisation volcanique et sédimentaire à l’Ordovicien supérieur en presqu’île de Crozon (d’après Thonon in Plusquellec et al. 2001)

En définitive, même si la coulée à pillow-lavas de la pointe de Lostmarc’h est sans doute la plus spectaculaire du Massif armoricain, c’est la diversité des brèches volcaniques qui retient l’attention faisant de la presqu’île de Crozon un musée in situ des formes d’expression du paléovolcanisme basaltique sous-marin sous faible tranche d’eau.

Texte et clichés: Jean Plaine

Bibliographie
(présentation chronologique)

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St-Jean du Doigt (29)

La sortie du 17.03.2007 à St-Jean-du-Doigt, Finistère
                                   

Le complexe gabbro-dioritique de Saint-Jean-du-Doigt


Sortie animée par Martial Caroff et Nolwenn Coint, Université de Bretagne occidentale, Brest
      

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A l’invitation de notre association, une trentaine de personnes se sont retrouvées au rendez-vous de Lanmeur pour aller à la découverte du “ Gabbro de Saint-Jean-du-Doigt ” réputé pour ses brèches magmatiques, ses mélanges plus ou moins complexes entre gabbros et diorites, mais dont l’histoire géologique, qui commence seulement à être déchiffrée, réserve bien des surprises.

Présentation : le contexte géologique (Fig.1)

Le massif de Saint-Jean-du-Doigt est localisé dans la région dite du Petit Trégor, entre la baie de Lannion et la baie de Morlaix.

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Figure 1- Schéma structural du massif de Saint-Jean-du-Doigt (d’après la feuille géologique Plestin-les-Grèves)

A l’est et au sud, le craton trégorrois à noyau paléoprotérozoique (Icartien, autour de 2 milliards d’années), écaillé lors des événements varisques de la fin de l’ère primaire, n’a, semble-t-il, pas subi le métamorphisme correspondant.
A l’ouest, en revanche, on trouve le domaine métamorphique du Léon, structuré durant les temps hercyniens.
Entre les formations léonardes et le complexe magmatique de Saint-Jean-du-Doigt se trouvent, d’ouest en est, les formations sédimentaires siluro-dévoniennes, la série dévono-carbonifère du bassin de Morlaix et l’intrusion mafique métamorphisée de Barnenez (dolérite), mise en place dans les formations carbonifères struniennes.
La signification de ce corps basique demeure énigmatique, même si des arguments géochimiques tendent à le rapprocher du massif de Saint-Jean-du-Doigt.
Le complexe gabbro-dioritique est bordé au nord par les granites de la Baie de Morlaix, mis en place vers 300 millions d’années. Ces plutons appartiennent à la famille des “ granites rouges ” nord-armoricains au sein de laquelle on compte, entre autres, le complexe granitique de Ploumanac’h.
Bien qu’un âge de 350 millions d’années a été proposé pour Saint-Jean (méthode Uranium/Plomb sur zircon, Chantraine et al. 1986), les arguments de terrain, notamment les contacts lobés entre gabbro et diorite, prouvent indubitablement que le complexe gabbro-dioritique et les granites sont contemporains.
Du point de vue géochimique, le gabbro montre une affinité de tholéiite continentale.

Saint-Jean-du-Doigt, un remarquable exemple de MASLI

  •   Le complexe de Saint-Jean-du-Doigt appartient à un groupe de corps intrusifs nommés dans la littérature internationale MASLI (Mafic-Silicic Layered Intrusions – Intrusions litées silico-basiques).
    Ces massifs sont considérés non pas comme de simples plutons, mais comme de véritables chambres magmatiques fossilisées.
    Ils se distinguent des complexes mafiques lités de type Skaergaard (Groenland) par le fait que les roches qui les constituent sont, pour la plupart, d’anciens liquides cristallisés et non des cumulats.
    Les MASLI sont tous caractérisés par des alternances gabbro-dioritiques et par la présence systématique de granites périphériques contemporains.
    Il existe au moins une autre intrusion de type MASLI dans le massif armoricain : le complexe gabbro-dioritique qui affleure dans la partie nord de l’île anglo-normande de Guernesey, dont l’âge est par contre cadomien.

    Les différents arrêts (Fig.2)

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Figure 2- Le circuit et les différents arrêts

A partir de Lanmeur prendre au nord la direction de Guimaëc. Dans ce bourg, contourner l’église par la gauche pour partir au nord vers Christ.
A l’entrée de ce hameau prendre à droite (fléchage) la route qui descend vers Poul Rodou. Stationner en face du café-librairie Capland and Co.
Depuis Capland and Co prendre le sentier littoral en direction de Beg ar Fri (Beg an Fry). Longer le littoral et, après la première pointe rocheuse marquée par un “ mur ” de granite, descendre sur l’estran rocheux.

Arrêt n°1- Poul Rodou (Poull Roudou) (Guimaëc) : Lits et diapirs

  Le site de Poul Rodou présente de remarquables alternances gabbro-dioritiques sous la forme de lits clairs dioritiques, aujourd’hui inclinés mais à l’origine horizontaux, bien identifiables au sein d’un ensemble gabbroïque sombre relativement homogène qui montre toutefois localement des cumulats à amphiboles.
Ces alternances sont en contacts lobés avec plusieurs petits corps granitiques contemporains.

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Lits et diapirs de Poull Roudou


D’un point de vue géochimique, les lits leucocrates ont une composition isotopique Sr-Nd (Strontium-Néodyme) différente de la roche environnante. Les niveaux dioritiques ne peuvent donc pas s’interpréter en tant que produit de différenciation du gabbro. Ce matériau magmatique s’est donc injecté dans le gabbro.
Les lits, épais de quelques dizaines de centimètres, plus ou moins réguliers, ont des bordures souvent lobées. Ils laissent échapper vers le haut de petits volumes de magma dioritique qui forment autant de diapirs leucocrates figés au cours de leur remontée au sein du magma gabbroïque.
Ces diapirs, constitués d’un matériel plus évolué et donc moins dense que les lits, sont issus de leur différenciation in situ. On observe en outre fréquemment autour de chacun d’entre eux une auréole de diffusion dans le gabbro.
Les diapirs ont tendance à s’hybrider dans le magma basique. Ils se morcèlent, s’effilochent, se décomposent en boules, ce qui explique l’aspect un peu hétérogène de l’estran.
Ils peuvent même rejoindre d’autres lits dioritiques.

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Lits et diapirs de Poull Roudou

La succession des événements magmatiques peut se décliner comme suit:

1/ Cristallisation de gabbro dans la chambre magmatique.

2/ Injection de magma dioritique. La diorite arrive dans la chambre et remonte par différence de densité. La charge cristalline du gabbro diminue et il y a équilibrage entre les deux magmas. Par la suite la diorite s’étale en forme de lit.

3/ Cristallisation au sein du lit dioritique, avec minéraux les plus denses à la base et apparition d’un jus résiduel qui s’en échappe sous forme de diapirs.

Du point de vue localisation dans la chambre magmatique, il est possible que l’on soit ici à la base du réservoir, périodiquement réalimenté par des jus dioritiques, ou bien en position latérale.

Remonter vers Christ, traverser le hameau (chapelle et croix) et poursuivre la route sinueuse sur environ 5 kilomètres. Obliquer à droite pour rejoindre la route littorale (D 79A) qui mène à gauche vers la plage de Saint-Jean-du-Doigt puis Plougasnou que l’on rejoint.
Dans Plougasnou prendre la direction de Primel-Trégastel (D46)
Stationner en bordure de la plage de Trégastel.

Arrêt n°2- Plage de Trégastel , Primel-Trégastel (Plougasnou) : Pegmatites gabbroïques

  Si la pointe de Primel est connue pour son granite qui a la même signification que le précédent, les rochers de la plage de Trégastel font affleurer des roches basiques qui montrent trois faciès différents.
Le faciès le plus répandu est un remarquable gabbro à grands cristaux squelettiques de plagioclases blancs et d’amphiboles sombres. La taille de ces minéraux atteint plusieurs centimètres. Les variations de texture y sont rapides et les niveaux monominéraux ne sont pas rares.
Ces roches sont globalement qualifiées de pegmatites gabbroïques ou de pegmatitoïdes.
Leur composition globale correspond à celle d’un gabbro magnésien et leur chimie est celle du faciès gabbroïque massif commun ce qui signifie qu’il ne s’agit pas d’un jus tardif qui aurait été différencié.

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Pegmatites gabbroïques de Primel

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce faciès provient non pas d’un lent refroidissement d’un magma basique, mais d’une cristallisation très rapide à partir d’un fluide pegmatitique par un phénomène de trempe du magma ; on y observe d’ailleurs du verre. Selon la pression de fluides on a tantôt des niveaux grossiers, tantôt des niveaux plus fins.
Le deuxième faciès correspond à des dolérites rencontrées sous forme de filons (dykes) au sein du premier faciès. Ces roches ont la même composition isotopique et la même composition minéralogique que les pegmatites gabbroïques. Elles sont considérées comme un système d’alimentation de la chambre magmatique.
Le troisième faciès, près de la route, est un gabbro à gros grain dans lequel les plagioclases blancs sont aisément identifiables. Il s’agit d’un faciès de cumulat à plagioclase + amphibole issu de la cristallisation fractionné d’un magma.
Il faut signaler que ces faciès de cumulats sont très présents entre Primel et Saint-Jean-du-Doigt, toujours en alternance avec des faciès pegmatitoïdes.
Il y a là l’association classique cumulat – pegmatitoïdes, celles-ci résultant d’un liquide échappé du cumulat
Du point de vue géométrique, nous sommes ici sur la bordure de la chambre magmatique, lors d’une étape précoce de la formation du massif gabbroïque avec alimentation au sein d’un cumulat, avant les associations que l’on observe à Poul Roudou qui elles correspondent à la partie inférieure du système magmatique rythmée par l’alternance lits gabbroïques-lits dioritiques.

Poursuivre vers la plage de Primel ; longer cette plage et remonter vers Plougasnou via Sainte-Barbe. Contourner complètement l’église de Plougasnou pour redescendre vers la Plage du bourg. Stationner sur le premier parking à gauche.

Arrêt n°3- Plage du bourg (Plougasnou) : mélanges magmatiques

L’anse de Saint-Jean-du-Doigt est traversée par une grande structure faillée globalement située à l’emplacement de la vallée du Donant de part et d’autre de laquelle les faciès magmatiques diffèrent.
A l’ouest de l’anse (plage du bourg de Plougasnou), on peut observer à la fois sur les blocs polis de grande taille et sur les affleurements de belles morphologies de mélange magmatique non homogénéisé entre gabbro et diorite (“ mingling ” ou mélange mécanique), ce qui procure un aspect chaotique à l’estran. Les parties gabbroïques sombres ont des contours arrondis, lobés au sein de la diorite claire.
Nous sommes vraisemblablement ici dans la partie centrale et dans la zone la plus évoluée de la chambre magmatique, là où les mélanges entre magma basique et magma plus acide sont les plus visibles.
Cette zone convective a produit des mélanges plus ou moins aboutis entre diorite et gabbro ainsi que des faciès d’hybridation.
A noter que le gabbro de Saint-Jean-du-Doigt est déjà, lui-même, le produit d’un mélange entre différents magmas basiques.
Parmi ces faciès, on distingue assez facilement des pegmatitoïdes à taches (pegmatites gabbroïques) dont le mécanisme de formation n’est, pour l’heure, pas expliqué.
Vers la pointe occidentale quelques filons aplitiques recoupent l’ensemble.

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Mélange magmatique ("Mingling") dans l'anse de Saint-Jean-du-Doigt

Faire quelques centaines de mètres pour rejoindre l’autre extrémité de la plage (plage de Saint-Jean-du-Doigt) où l’on stationnera. Partir à pied sur la droite vers les rochers qui ferment à l’est la plage et poursuivre au delà de la première pointe.

Arrêt n°4- Plage de Saint-Jean-du-Doigt (Saint-Jean-du-Doigt) : brèches magmatiques

Si à l’est de la faille de Saint-Jean-du-Doigt on retrouve l’association gabbro-diorite, les structures qui dominent sur cette portion de côte correspondent à des brèches constituées de blocs mélanocrates de gabbro de toutes tailles qui baignent dans une matrice leucocrate dioritique. Cette disposition traduit vraisemblablement la fracturation hydraulique par un jus dioritique de zones gabbroïques quasiment solidifiées (“ magmatic stopping ”).
Ces brèches magmatiques se sont formées à la limite cassant-ductile comme en témoignent les blocs de gabbro aux contours à la fois anguleux (cas le plus fréquent) et plus lobés.
Contrairement à l’arrêt précédent, nous ne sommes plus au coeur de la chambre magmatique mais plutôt à sa périphérie
Les formations de l’anse de Saint-Jean-du-Doigt sont traversées par des dykes doléritiques et dioritiques.

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Brèches magmatiques ("magmatic stopping") dans l'anse de Saint-Jean-du-Doigt

Conclusion : Un modèle préliminaire de chambre magmatique

Par comparaison avec d’autres complexes de type MASLI, en particulier celui de Guernesey, qui fait actuellement l’objet d’une étude parallèle, ces faciès contrastés sont interprétés comme reflétant différents niveaux d’une chambre magmatique.


(1) Les alternances gabbros – lits/diapirs leucocrates de Poul Rodou se seraient formés dans la partie inférieure d’une chambre magmatique périodiquement réalimentée par des jus dioritiques.

(2) Les faciès de mélange de Saint-Jean Ouest (Plougasnou) correspondraient à la partie centrale convective du réservoir, tandis que les brèches anguleuses de Saint-Jean Est seraient un faciès latéral.

(3) Les pegmatites gabbroïques pourraient s’être formées dans la partie supérieure du réservoir, peut-être au début de son fonctionnement.

(4) Les granites septentrionaux ont une position périphérique. Près de leur contact, le gabbro contient parfois des enclaves de socle. Ceci suggère une mise en place précoce des granites.

Comme on l’a vu, les quelques points visités sur le segment littoral menant de Poul Rodou à Primel-Trégastel offrent la possibilité d’accéder à des objets géologiques d’une très grande originalité en Bretagne, qui sont loin d’avoir révélé tous leurs secrets, les gabbros y étant par ailleurs fort rares.
Nul doute que ces localités doivent dès à présent être intégrées au patrimoine géologique régional.

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Texte : Jean Plaine, Martial Caroff, Nolwenn Coint
Clichés : Jean Plaine

Document utile

Carte géologique à 1/50 000ème, feuille n°202 Plestin-les-Grèves.

Bibliographie

CHANTRAINE J. et al. 1986- Notice explicative de la feuille Plestin-les-Grèves, 84p., BRGM éd.

SANDREA A. 1960- Contribution à la lithologie de la côte nord de la Bretagne, Bull.Serv.Carte géol.France,258.

 

Vendée (44 & 85)

 

La sortie du 17.06.2006 en Loire-Atlantique et Vendée
                                   

A la recherche des océans et des continents perdus: Les éclogites de Vendée
et leur encaissant poly-orogénique


Sortie animée par Gaston Godard, Université Pierre et Marie Curie, Paris 6
      

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Pour cette sortie de fin de printemps entre Loire-Atlantique et Vendée, des membres de la Société des Sciences naturelles de l’Ouest de la France et des Naturalistes vendéens sont venus augmenter le nombre de ceux de la Sgmb. Ainsi, 35 personnes se sont présentées au rendez-vous de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu pour aller à la rencontre des roches particulières que sont les éclogites armoricaines et leurs gneiss encaissants.

Introduction

Trois ensembles lithostructuraux sont classiquement distingués en Vendée (Fig.1) :
- le complexe des Essarts-Mervent individualisé dans des formations métamorphiques disposées en lames verticales.
- les unités nord-vendéennes au nord-est qui comprennent l’unité de Chantonnay, l’unité de Montaigu, le Haut-Bocage.
- les unités sud-vendéennes au sud-ouest qui regroupent le Bas Bocage et la Vendée littorale.

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Figure 1- Carte géologique simplifiée du massif vendéen

Ces différentes unités sont limitées par des zones de fractures d’ampleur crustale, de direction NW-SE, que l’on peut rapporter à des structures satellites du cisaillement sud-armoricain.
C’est au sein du complexe des Essarts-Mervent qu’entre Loire-Atlantique et Vendée, l’unité haute-pression des Essarts apparaît encadrée par le sillon houiller de Vendée au nord-est et par la ligne tectonique Sainte-Pazanne-Mervent au sud-ouest.
Ces deux failles délimitent un couloir de près de 150 kilomètres de long pour quelques kilomètres de large qui comprend 3 unités métamorphiques distinctes : (1) l’unité à éclogites des Essarts, (2) l’orthogneiss de Chantonnay-Mervent, (3) l’unité épizonale de Roc-Cervelle (Fig.2).

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Figure 2- Carte synthétique de l’Unité des Essarts (d’après Godard)

Les éclogites de l’unité haute-pression des Essarts et les roches associées forment des lentilles de plusieurs kilomètres de long qui sont pincées et faiblement boudinées au sein des gneiss environnants. Ce sont ces roches qui ont retenu notre intérêt lors de cette sortie.

Eclogite

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C’est l’abbé Haüy qui les a baptisées en 1822, s’appuyant sur la “ sélection ” singulière des minéraux les constituant, un grenat et un clinopyroxène, le mot “ sélection ” ou “ choix ”se disant “ eklogê ” en grec.

Le circuit et les différents arrêts (Fig.3)


>> Avertissement : la plupart des sites visités sont sur des domaines privés ; leur accès est donc soumis à autorisation.

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Figure 3- Le circuit et les différents arrêts

Depuis l’église de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu prendre au sud-ouest la direction de Touvois (D65) puis, toujours dans la ville, à droite la direction de la Marne via le Breuil. Après environ 1500 mètres, on atteint un château d’eau installé à un carrefour. Stationner en bordure de la route qui part à droite.

Arrêt n°1- Château d’eau (Saint-Philbert-de-Grand-Lieu)

De ce point élevé et carte géologique à l’appui, il est possible de faire une lecture du paysage et de comprendre comment les diverses unités géologiques se marquent dans la topographie.

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L’unité de haute pression des Essarts (Unité H-P) dans laquelle se rencontrent les éclogites est délimitée par deux grandes failles tardihercyniennes.
Elle se reconnaît aux reliefs qu’elle forme dans la topographie (Corcoué-sur-Logne, Rocheservière). Ces reliefs ont été réactivés récemment comme en témoignent les grabens remplis de sédiments tertiaires parmi lesquels se trouve le gisement fossilifère de la Marnière qui est redonien (Plio-pléistocène).
Elle est bordée au sud par l’unité métavolcanique de Saint-Martin-des-Noyers à bimodalité volcanique basique (amphibolites) et acide (rhyolites à dacites) qui n’a pas subi le métamorphisme éclogitique, tandis qu’au nord, elle s’appuie sur le sillon houiller de Vendée.

En cet endroit, la zone éclogitique, large de 5 à 6 kilomètres, est masquée au nord-ouest par les sédiments récents du Lac de Grand-Lieu.

Continuer au nord-ouest la petite route jusqu’à la D 117.
Prendre à droite vers Saint-Philbert-de-Grandlieu et, au rond-point suivant, prendre à gauche la D61 vers Saint-Lumine-de-Coutais.
Après 250 mètres stationner à droite au niveau de la Piltière.

Arrêt n°2- Manoir de la Piltière (Saint-Philbert-de-Grand-Lieu)

Si la reconnaissance des éclogites de Vendée et de Loire-Atlantique est le fait de Rivière et de Dubuisson dans les années 1830, la première description pétrographique des éclogites armoricaines est due à Alfred Lacroix (1891,1893,1913) et à Charles Baret (1882, 1898, 1900).
C’est d’ailleurs ce dernier, pharmacien nantais féru de pétrographie et de minéralogie, qui a découvert en 1900 ce remarquable gisement.

En cet endroit, connu sous le nom de la Compointrie (ou Compointerie), hameau situé à 800 mètres plus à l’ouest, les éclogites sont remarquables. De ce fait, elles figurent dans de nombreuses collections soit brutes soit polies. Ces roches, dont l’étude approfondie a été effectuée en 1920-21 par Yvonne Brière, sont encore aujourd’hui heureusement visibles parmi les rocailles du manoir de la Piltière et dans les moellons des montants du portail et des murs du logis.
La propriétaire des lieux nous en a présenté avec fierté un échantillon poli taillé en forme d’obélisque.

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Ces éclogites sont des roches grenues essentiellement constituées d’omphacite (pyroxène) qui leur donne une couleur générale vert-clair très caractéristique, accompagnée de disthène bleu à blanchâtre et surtout de nombreux grenats roses de taille centimétrique. La matrice contient également de la zoïsite et de la hornblende magnésienne.

Elles offrent d’intéressantes structures de rétromorphose, pour certaines bien visibles à l’oeil nu. Le grenat est systématiquement entouré d’une couronne sombre constituée d’amphibole secondaire développée à l’interface avec l’omphacite ; c’est une structure kélyphitique. Le disthène peut être partiellement remplacé ou bien montrer une couronne à micas (preiswerkite et margarite), selon la réaction disthène + amphibole ---> preiswerkite + margarite + plagioclase.
En lame-mince, l’omphacite paraît souvent décomposée en une symplectite à clinopyroxène et oligoclase, selon la réaction omphacite + quartz ---> clinopyroxène + plagioclase.

La preiswerkite et la margarite sodique sont des micas peu usuels, très rares dans la nature.
Ils ont été observés tous les deux ensembles dans deux gisements à éclogites : la Compointrie en France et Liset en Norvège. Ils correspondent à des produits de rétromorphose dans des couronnes ou des symplectites autour du disthène.
La rareté de ces deux micas n’est pas liée à des conditions de pression et température peu courantes ou extrêmes.
Elle semble plutôt correspondre à des compositions chimiques inhabituelles, apparaissant dans des systèmes saturés en eau, pauvres en silice, riches en sodium et aluminium, surtout, sinon exclusivement, pour des conditions de pression et température du faciès schistes verts ou du faciès amphibolite.

Ces éclogites sont issues du métamorphisme de protolithes gabbroïques qui appartiennent à une suite tholéiitique. Ce sont plus précisément des leucogabbros troctolitiques qui ont des caractéristiques de cumulats.
Ils pourraient représenter les fragments d’une vieille croûte océanique métamorphisée.
Des éclogites identiques sont connues à Saint-Denis-la-Chevasse (Fig.3) dans une carrière abandonnée et des blocs erratiques sont observables dans quelques autres gisements.

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A signaler que dans le hameau de la Compointerie, une petite rue dénommée Chemin de l’Eclogite renvoie à l’existence de cette roche dans le sous-sol. C’est aussi le point de départ d’un circuit de randonnée appelé “ circuit de l’Eclogite ”.

Poursuivre sur la D61 jusqu’au hameau de la Compointerie pour faire demi-tour et revenir vers Saint-Philbert-de-Grand-Lieu.
Passer devant l’église et prendre la direction de Saint-Colomban et Saint-Philbert-de-Bouaine par la D70.
Après environ 3 kilomètres, prendre à droite une petite route qui mène à Malville et à une déchetterie.
Après quelques centaines de mètres, en haut de butte, stationner à droite au niveau d’un chemin qui part dans les vignes.

Arrêt n°3- Malville (Saint-Philbert-de-Grand-Lieu)

Les vignes au nord-ouest de Saint-Colomban permettent de collecter, sous forme de blocs épars, des roches plutôt rares dans le Massif armoricain. Ce sont des péridotites totalement serpentinisées et silicifiées, transformées de ce fait en roches nommées birbirites.

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Les birbirites sont des roches quartzitiques, brunes, plus ou moins riches en fer, dénommées ainsi par Duparc en 1927. Leur nom dérive de la rivière Birbir en Ethiopie. Elles résultent de l’altération météorique, de l’hydratation, de serpentinites ou de péridotites.
Lors de l’altération, la serpentine est déstabilisée, perdant ses oxydes et ses hydroxydes de magnésium ; il ne reste que la silice et le fer qui mènent à la silicification.
Elle est caractérisée par des textures microcristallines dans lesquelles de la calcédoine et de petits cristaux de quartz apparaissent le long de masses colloïdales de limonite.
Dans les birbirites de Saint-Colomban, le protolithe ultramafique (péridotite à grenat) peut être reconnu dans de rares minéraux reliques (serpentine, anthophyllite, pyrope) tandis que la serpentinisation se lit dans une structure en “ peau de serpent ” résultant de la pseudomorphose de grains d’olivine.
L’altération se serait produite au Paléogène (Eocène), période d’intense altération météorique en Vendée, alors que les roches ultramafiques se trouvaient sous climat tropical et proches de la surface d’érosion yprésienne. On sait qu’à cette époque, les roches ont été affectées sur une épaisseur de plus de 10 mètres. C’est le cas pour les éclogites, les amphibolites et surtout les gneiss.

Revenir vers la D70 et aller à droite vers Saint-Colomban.
Dépasser cette localité et poursuivre vers Saint-Philbert-de-Bouaine.
400 mètres après avoir franchi la Boulogne et être entré en Vendée, aller à droite vers la Gerbaudière.

Arrêt n°4- Carrière de la Gerbaudière (Saint-Philbert-de-Bouaine)

La carrière de la Gerbaudière, ouverte à proximité de Saint-Philbert-de-Bouaine, s’étend sur environ 30 hectares. Il s’agit d’un très grand boudin d’éclogites, l’un des plus grands gisements au monde, long de plusieurs kilomètres, que l’exploitation a largement mis au jour.
La carrière est allongée parallèlement à la lentille d’éclogite. On y extrait des roches massives pour granulat et accessoirement pour enrochement.

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Les différents fronts de taille et les gradins permettent d’observer les divers faciès des éclogites qui sont ici des éclogites à quartz, ainsi que leurs relations avec les gneiss de l’encaissant. Ces derniers sont des paragneiss (gneiss dérivés de roches sédimentaires) qui apparaissent sous forme de panneaux à l’intérieur des éclogites sans que l’on puisse voir le contact entre les deux types de roches.
Le rubanement et la foliation des gneiss sont parallèles à la foliation des éclogites qui est ici subverticale.

L’éclogite de la Gerbaudière apparaît constituée de cristaux de grenat rouge, souvent automorphes, dont la taille moyenne est de 4 à 5 millimètres dispersés dans une matrice foliée (déformation syn-éclogitique) verdâtre consistant en quartz et principalement en omphacite. Zoïsite, clinozoïsite, rutile, ilménite, sulfures (pyrite bien visible), et calcite sont les minéraux accessoires.
A l’échelle de l’affleurement, elle montre fréquemment une structure rubanée dans laquelle se succèdent niveaux à grain grossier, niveaux à grain plus fin, riches en grenat, niveaux massifs à grain fin sans grenat. Ce rubanement a été transposé dans la foliation au moment de l’épisode de métamorphisme éclogitique. Il est sans doute originel au protolithe de cette variété d’éclogite qui est globalement un gabbro à olivine.
La roche offre les caractéristiques géochimiques d’un basalte de ride médio-océanique (MORB). Cette éclogite pourrait donc représenter les fragments d’une vieille croûte océanique métamorphisée.

La déformation plastique de ce protolithe lors du métamorphisme en faciès éclogite est soulignée par l’omphacite aplatie parallèlement au rubanement.
Au microscope, des minéraux inclus dans les cristaux de grenat (quartz, zoïsite, amphibole...) appartiennent clairement à une paragenèse plus ancienne, pré-éclogitique suggérant que le protolithe était plus précisément une roche gabbroïque amphibolitisée et saussuritisée généralement non déformée.
Le métamorphisme responsable de la transformation du protolithe gabbroïque s’est produit à une température de l’ordre de 650-750°C et une pression avoisinant les 20kbar, soit à une profondeur d’environ 50-60km.

A l’opposé, on y observe tous les stades de la rétromorphose qui conduit à de véritables amphibolites.
Le grenat est entouré d’une couronne kélyphitique à amphibole, plagioclase, magnétite, chaque omphacite est auréolée d’un liseré de symplectite à clinopyroxène et plagioclase.
Durant le métamorphisme rétrograde, la plus grande partie de l’éclogite a été transformée en amphibolite qui montre une paragenèse finale de hornblende vert sombre + plagioclase + quartz ± épidote ± grenat ± sphène.
Cette amphibolitisation affecte partout les bordures de la lentille d’éclogite. Elle se développe également à partir de fractures tardives séquantes sur la foliation au long desquelles circulent des fluides aqueux ; la roche se charge en amphiboles, devient noire.
Des datations effectuées sur les éclogites de la Gerbaudière fournissent un âge de refroidissement autour de 320 millions d’années (Carbonifère).
Il apparaît également qu’elles ont été amenées en surface à la fin du Carbonifère (autour de 300 millions d’années) puisqu’elles se retrouvent en galets dans les dépôts carbonifères stéphaniens du sillon houiller vendéen.

La roche qui possède d’indéniables qualités ornementales a servi à la réalisation de divers monuments. Ainsi, la municipalité de Saint-Philbert-de-Bouaine a utilisé l’éclogite de la Gerbaudière (appelée Pierre de Bouaine) pour construire une fontaine sur la place du village (place des Halles juste au nord de l’église).

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On la trouve également dans une stèle à l’honneur de René-Just Haüy, célèbre minéralogiste “ inventeur ” des systèmes cristallins qui a décrit le premier l'éclogite, et sur la tombe du géologue Jackson.
A noter que cette carrière, pour ses intérêts scientifiques et pédagogiques majeurs, figure à l’inventaire du patrimoine géologique de Vendée (fiche n°5) site web : http://www.vendee.fr/vendee/dossiers/default.asp?dsp=540

Traverser la Gerbaudière pour rejoindre la D74.
Aller à gauche vers Saint-Philbert-de-Bouaine.
Dans la localité prendre à droite vers Rocheservière (D 937).
Entrer dans Rocherservière pour prendre la direction de Mormaison (D7).
A la sortie du village, après la gendarmerie, prendre à droite un chemin qui descend vers la Boulogne, au bout duquel existe une aire de pique-nique.

Arrêt n°5- Rive de la Boulogne (Rocheservière)

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Les faciès gneissiques encaissants de l‘éclogite affleurent au niveau de l’aire de pique-nique sous le sanctuaire de la vierge. Ce sont ici des paragneiss avec des pseudomorphoses sombres de cordiérite allongées parallèlement à la foliation.
Ils affleurent au long de la Boulogne sur deux kilomètres selon une bande orientée Nord-Ouest – Sud-Est.

Revenir vers le centre de Rocheservière et prendre à droite en direction de la Roche Blanche une petite route qui longe la Boulogne.
Dépasser la Garde, le Moulin Neuf. Peu après la Valotière, prendre à gauche, toujours en direction de la Roche Blanche.
Après 150 mètres aller à gauche vers le Manoir de la Ruffelière.

Arrêt n°6- Manoir de la Ruffelière (Rocheservière)

Le manoir de la Ruffelière, près de Saint-Philbert-de-Bouaine, fut détruit en 1417 durant la guerre de 100 ans, reconstruit dans les années 1420 par Aliette de Polhay et Jehan de Goulaine, puis à nouveau incendié en 1794 durant la Guerre de Vendée (Aillery, 1914).

Bien que la plupart des gneiss environnant les éclogites sont foliés et montrent un métamorphisme rétrograde, il en est qui sont moins déformés. Les structures et les paragenèses anciennes y sont alors préservées et révèlent une histoire métamorphique précoce très complexe qui se lit aussi bien dans des orthogneiss (gneiss dérivés de roches magmatiques) que dans des paragneiss. Ces derniers sont réputés être les plus intéressants.
Ce sont en général des paragneiss coronitiques qui montrent des évidences d’un épisode de métamorphisme haute température-basse pression (migmatites à cordiérite) suivi d’un épisode de faciès éclogitique (grenat coronitique) (Godard, 1998). Ils sont identifiables dans quelques affleurements, comme à l’arrêt précédent, mais aussi dans les appareillages des constructions ce qui est le cas au manoir de la Ruffelière.
Sur le sol de la cour de ferme, la roche affleure, montrant une structure litée, rubanée avec développement de veines quartzo-feldspathiques (leucosome) qui évoquent clairement des migmatites.
Il s’agit de l’encaissant gneissique des éclogites, avec son double métamorphisme, de haute-température (paragenèse de migmatite à cordiérite), puis de haute-pression (couronnes réactionnelles de faciès éclogite).

Cependant, ce qui retient l’attention, ce sont les murs de la propriété qui sont élevés avec une roche qui renferme de grandes taches sombres centimétriques de cordiérite pseudomorphosée.
La dalle principale sous le porche d’entrée de la cour du manoir qui a été polie par le passage des pieds durant des siècles, montre de spectaculaires pseudomorphoses dont certaines ont la forme de cordiérite pseudohexagonale.

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Ces métapélites sont des migmatites à cordiérite dans lesquelles celle-ci est remplacée par des minéraux cryptocristallins.
Elles gardent la mémoire de deux épisodes successifs de métamorphisme : le premier, de haute-température/basse-pression, qui a transformé les roches sédimentaires originelles en migmatites avec silicates d’alumine (cordiérite, sillimanite), le second, de haute-pression qui a vu leur remplacement par une paragenèse haute-pression à grenat, disthène, quartz, dont on voit aujourd’hui l’empreinte.

Revenir à Rocheservière et prendre la direction de Montaigu par la D753.
Dépasser Vieillevigne pour prendre, avant Montaigu, l’autoroute A83 en direction de Niort.
Après environ 25 kilomètres sur l’autoroute, prendre la sortie n°5 vers les Essarts.
Rejoindre les Essarts. Dépasser le vieux château et, à hauteur de l’église, prendre sur la droite la D 39 vers Boulogne.
2 kilomètres après être sorti des Essarts, prendre à droite le chemin qui mène au Manoir de Grezay.

Arrêt n°7- Grezay (Les Essarts)

Comme au manoir de la Ruffelière, les murs des dépendances du manoir de Grezay offrent un échantillonage pratiquement exhaustif des roches qui existent à proximité : ce sont des paragneiss coronitiques, des orthogneiss coronitiques, des métapélites et des métagranites. Toutes ces roches ont une signature de croûte continentale.

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A quelques centaines de mètres au sud des bâtiments, à droite du chemin ramenant à la route, une migmatite nébulitique par la suite métamorphisée sous les conditions du faciès éclogitique affleure dans une petite carrière délaissée. Comme à la Ruffelière, des points sombres centimétriques correspondent à de la cordiérite poecilitique. La migmatite montre de nombreuses petites veines de leucosome qui elles aussi renferment de la cordiérite.

Les épisodes métamorphiques

Les méthodes modernes d’analyse avec notamment l’analyse d’images multispectrale de cartes d’éléments chimiques obtenues au microscope électronique à balayage permettent de reconstituer l’histoire de la roche et donc la succession des épisodes métamorphiques .

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Exemple d'image produite par l'analyse multispectrale (in Godard, 2001)

Toutes ces roches montrent des évidences pétrologiques de deux épisodes métamorphiques :

a/ Episode Haute-Température – Basse-Pression : une paragenèse précoce, typique de conditions de HT-BP, consiste en biotite + grenat + quartz + plagioclase ± cordiérite ± feldspath potassique ± silicate d’alumine + ilménite.
Le silicate d’alumine est actuellement du disthène, mais provient de la sillimanite de laquelle il montre la structure fibroblastique (fibrolite).
La cordiérite est entièrement remplacée par des minéraux cryptocristallins qui constituent les taches sombres observées à la Ruffelière.

La biotite, le quartz et les anciennes sillimanites sont toujours séparés les uns des autres par les pseudomorphoses de cordiérite qui en plus entourent et isolent les sillimanites précoces.
Une telle structure signifie que la cordiérite s’est développée aux dépens de la biotite, du quartz et de la sillimanite selon une réaction de migmatisation bien connue :
Biotite + quartz + sillimanite (± plagioclase) ---> cordiérite + produit de fusion (± grenat ± feldspath potassique).

Ce processus est connu pour intervenir autour de 3-7 kbar et 700-850°C, en fonction des fluides et de la composition minérale.

D’autre part la migmatitisation est évidente se reconnaissant dans la présence fréquente de leucosomes et de structures nébulitiques.

b/ Episode de Haute Pression en faciès éclogite : pendant un second épisode, ces roches subissent un métamorphisme haute pression qui est souligné par plusieurs réactions métamorphiques (une quinzaine environ) parmi lesquelles on peut mentionner :
cordiérite ---> grenat + quartz + disthène (+micas)
sillimanite ---> disthène
biotite + plagioclase ---> grenat + phengite + quartz + rutile (couronne de grenat à l’interface biotite-plagioclase).

Ces réactions sont caractéristiques d’un métamorphisme HP qui est certainement contemporain de celui qui a donné les éclogites voisines.

La séquence des événements métamorphiques peut s’expliquer par un seul trajet PTt (Pression-température-temps) partant de hautes-températures (paragneiss migmatitiques à cordiérite) pour aller vers la haute-pression (couronnes et pseudomorphoses de faciès éclogite) mais pose des difficultés en terme de géodynamique.

Deux observations confortent l’hypothèse de deux trajets successifs :

a/ l’analyse des pseudomorphoses de cordiérite à la microsonde électronique indique des compositions qui sont compatibles avec des produits d’altération de ce minéral à savoir de la pinite qui est un agrégat polycristallin de chlorite + séricite, ceci à un température inférieure à 400°C.
La cordiérite a été altérée avant d’être remplacée par la pseudomorphose, c’est-à-dire avant le métamorphisme haute pression.

b/ l’association symplectique phengite + quartz qui remplace partiellement le feldspath potassique durant le métamorphisme éclogitique s’est développée de façon préférentielle au long des perthites. Ceci signifie que l’exsolution des perthites s’est produite avant l’épisode de métamorphisme haute-pression.

De ce fait, les roches ont subi leur première rétromorphose entre l’épisode de haute-température et l’épisode de haute-pression qui s’inscrivent dans deux cycles orogéniques, l’un prévarisque, l’autre varisque.

Datation des épisodes métamorphiques

La datation des épisodes métamorphiques, réalisée sur monazite, place l’épisode de haute-température à l’Ordovicien supérieur, autour de 450 millions d’années, et l’épisode de haute-pression au Dévonien, autour de 400 millions d’années.
Ces âges ne sont cependant pas “ purs ” et doivent donc être lus avec précaution.

Conclusion

Les éclogites ont des caractères géochimiques de roches océaniques. La lignée tholéiitique inclut des péridotites altérées (vraisemblablement à grenat), des éclogites à disthène, des éclogites à quartz, des éclogites ferro-titanées et des ortho-leptynites dérivant de plagiogranites.
La roche anté-éclogitique était un gabbro amphibolitisé et saussuritisé dans lequel on décèle un métamorphisme et une altération océaniques.
Le principal épisode de déformation ductile est contemporain des conditions éclogitiques.

Une partie des gneiss encaissant les éclogites a conservé la mémoire de deux épisodes métamorphiques. Ce sont des gneiss migmatitiques à cordiérite (premier épisode, de haute température) affectés par le métamorphisme éclogitique (second épisode, de haute pression).
Ces deux stades métamorphiques sont séparés par un épisode de rétromorphose, de sorte que ces roches semblent avoir subi deux cycles orogéniques distincts, pré-varisque et varisque.
Elles pourraient appartenir à une croûte continentale ancienne entraînée dans la même subduction éovarisque que les éclogites qui elles seraient d’origine océanique.

L’unité de haute pression des Essarts apparaît ainsi constituée de terrains pré-varisques d’origine océanique probable (éclogites) et continentales (ortho- et para-gneiss), impliqués dans la même convergence éo-varisque.
Il reste néanmoins à expliquer comment on y trouve aujourd’hui juxtaposés des fragments de croûte océanique et des fragments de croûte continentale.

Texte : Jean Plaine
Clichés : Tahar Aïfa et Jean Plaine

Documents utiles

Feuille géologique à 1/50 000ème : Saint-Philbert-de-Grand-Lieu n°508 (éditions du BRGM)

Annexe

Les 4 variétés d’éclogites distinguées par Godard (1988) :

A/ Eclogite à disthène, riche en magnésium et sans quartz : la matrice de clinopyroxène (Cpx) vert-clair de cette variété est ponctuée de cristaux de grenat rose dont la taille peut atteindre plusieurs centimètres.
Le disthène, la zoïsite et l’amphibole syn-éclogite faiblement colorée sont aussi abondants.
Les deux gisements principaux de cette belle roche sont La Compointrie, découvert par Baret en 1900 et Saint-Denis-la-Chevasse en carrière abandonnée.
Des blocs erratiques sont aussi connus dans d’autres petits gisements.

B/ Eclogite à disthène, pauvre en quartz : elle apparaît associée au faciès précédent.
Elle était abondante dans l’ancienne carrière de Pied-Pain (sud-ouest de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu) et des niveaux métriques existent dans la carrière de la Gerbaudière.

Ses caractéristiques pétrologiques sont intermédiaires entre l’éclogite A et l’éclogite C.

C/ Eclogite à quartz : c’est la variété la plus abondante constituant 95% du volume total des éclogites.
Les meilleurs gisements en sont les deux carrières de la Gerbaudière à Saint-Philbert-de-Bouaine.
La roche renferme des cristaux de grenat, généralement subautomorphes dont la taille moyenne est de l’ordre de 4 à 5 millimètres, inclus dans une matrice foliée consistant en quartz et en omphacite.
Des faciès sombres à amphiboles syn-éclogites dessinent un litage parallèle à la foliation syn-éclogite
Zoïsite, clinozoïsite, rutile, ilménite, sulfures et calcite sont les minéraux accessoires.

D/ Eclogite ferro-titanées à quartz : l’omphacite y est inhabituellement d’un vert sombre et le grenat est rouge brillant. Ces teintes sont dues à une haute teneur en fer.
De plus, la teneur en rutile atteint facilement 4% du volume de la roche.
Ce faciès occupe 2 à 3% des éclogites de Vendée.
Les affleurements principaux se trouvent près de Rocheservière et de Boulogne.


0rientation bibliographique

Le lecteur trouvera l’essentiel dans :

GODARD G. 2001- The Les Essarts eclogite-bearing metamorphic Complex (Vendée, Southern Armorican Massif) : Pre-Variscan terrains in the Hercynian belt ?. Géologie de la France, 1-2, 19-52.

La suite, par ordre chronologique :

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